La psychologie positive

Elle se définit comme « l’étude des conditions et des processus qui contribuent à l’épanouissement ou au fonctionnement optimal des individus, des groupes et des institutions ».

Pour faire plus simple, disons que c’est la branche de la psychologie qui cherche à comprendre les mécanismes du bonheur. Elle se distingue de la psychopathologie qui cherche, elle, à comprendre les perturbations de la psyché pouvant créer des souffrances. Les deux approches sont complémentaires. La psychologie positive ne s’oppose donc pas à une éventuelle psychologie qui serait négative. D’ailleurs, c’est en cherchant à lutter contre la dépression que Martin Seligman a développé le concept de psychologie positive.

La psychologie positive n’est pas une recherche de méthodes miraculeuses pour trouver le bonheur à bon compte. Elle ne se confond pas non plus avec un hédonisme béat qui pourrait prétendre qu’il suffit de voir la vie du bon côté pour être heureux. C’est une approche scientifique, qui possède sa dimension cognitive (comprendre) et pragmatique (agir pour obtenir un résultat). Elle s’applique donc tout-à-fait à la psychothérapie, dont le but est de résoudre les difficultés et souffrances psychiques, donc d’aller vers plus de bonheur.

Ce qui différencie de la psychopathologie, est qu’elle s’intéresse aux personnes qui sont en bonne santé mentale, et non seulement aux souffrants. La psychologie positive s’écarte donc du modèle médical de la santé. Pour ce dernier, la santé est l’état normal, la maladie une détérioration de cet état. « La santé c’est la vie dans le silence des organes » disait le chirurgien lyonnais René Leriche. Il faut donc soigner pour revenir, via la guérison, à l’état normal.

La santé mentale ne peut pas se définir uniquement par l’absence de maladie. Le bonheur ne se réduit pas à l’absence de souffrance. Et la souffrance peut, au contraire, être signe de santé mentale. La perte, par exemple, d’un être cher provoque une intense souffrance, dont l’absence serait plutôt inquiétante. La psychothérapie s’inspirant de la psychologie positive ne cherche pas seulement à faire disparaître le trouble dont souffre l’individu, mais à l’aider à trouver un état qui le rende suffisamment heureux.

Les principes :

On définira la santé mentale par cinq composantes :

  1. Capacité à profiter de la vie : bien être subjectif
  2. Capacité à s’adapter à des changements de situation : faire face sur les trois dimensions, cognitive, émotionnelle et comportementale.
  3. Bien être émotionnel : gérer ses émotions pour qu’elles contribuent à l’équilibre.
  4. Appartenance sociale : faire partie de groupe où l’on se sent bien.
  5. Valeurs spirituelles.

 

Mihaly Csikszentmihalyi

 Mihaly Csikszentmihalyi

Risques et protection

Il existe des facteurs généraux qui font courir des risques de déstabilisation de la santé mentale (du bonheur).

  • D’origine externe : deuil, chômage, accident, séparation, guerre …
  • D’origine interne : ce sont les pathologies de la personne (anxiété excessive, tocs, peurs diverses, jalousie, manque de confiance en soi, …) On se retrouve ici dans le domaine de la psychopathologie.

Ces facteurs sont généraux, mais leur impact sur une personne donnée dépend d’autres facteurs. En général, c’est la présence de plusieurs facteurs qui va aboutir à une perturbation de la santé mentale, souvent de la conjonction de facteurs externes et internes.

Protections.

On peut trouver des moyens de se protéger contre ces facteurs de risques. Il y a des protections non psychologiques (avoir une assurance, faire attention à sa santé, …) et des protections psychologiques. Celles-ci ne vont pas empêcher la perturbation (on ne peut pas ressusciter une personnes décédée ou revenir avant un accident) mais agir sur l’impact provoqué par les facteurs de déstabilisation. Un bon réseau relationnel, une relation intime de bonne qualité, des passions, une activité physique saine, et… une psychothérapie, sont des protections et une aide à passer la difficulté, sans pour autant la nier.

Ressources

Chacun possède des ressources qui vont pouvoir être mises en action pour se protéger contre les facteurs de risques, mais aussi pour entretenir sa santé mentale et acquérir ou maintenir le bien-être. La mobilisation de ces ressources n’est pas une voie miraculeuse pour être tout le temps dans le bonheur, mais pour développer celui-ci et le préserver autant que possible des dégradations inévitables qu’il subit (par exemple un deuil).

Adaptation

Comment se comporter dans une situation donnée pour en tirer les bénéfices et éviter les souffrances, autrement dit optimiser le bien-être et éviter au mieux le mal-être ? la réponse se trouve dans la capacité d’adaptation aux circonstances. Attention, un événement heureux, en provenance de l’extérieur peut avoir des conséquences négatives s’il est mal traité. L’exemple des gagnants du loto le montre, comme l’a illustré avec humour le film « Heureux gagnants ».

D’un autre côté, un fait désagréable comme un licenciement, ou même un accident, peut permettre un rebond dans la vie, en actionnant le phénomène de résilience

Le rôle des émotions

Les émotions sont essentielles à la vie psychique, y compris les « négatives » : tristesse, colère, peur, qui sont des avertisseurs. Mais les émotions positives ont un effet bénéfique sur la capacité de résolution de problèmes et de récupération de l’équilibre psychique. Créer des émotions positives permet de mieux répondre au stress, en particulier par contrôle du rythme cardiaque. 

Les trois facteurs de bonheur selon Seligman

Plaisir

On pourrait s’y attendre. Le plaisir est un facteur contributif du bonheur. Un minimum de plaisirs semble être indispensable à une vie heureuse. Il peut être de nombreux types. Plaisir sensoriel (bien manger, voir quelque chose de beau, écouter un chant, ressentir son corps). Il peut être plus élaboré comme le plaisir de la culture, du sport, du jeu, de l’amour… Il est préconisé de s’accorder un minimum de moments de plaisir simple. Mais attention ! ce n’est pas suffisant, et peut même devenir toxique.

Engagement

L’engagement (dans une tâche, une orientation, une croyance, une aventure…) implique une idée de durée, et de lien avec l’environnement. Contrairement au plaisir qui peut être instantané et interne, l’engagement se situe dans l’espace-temps.

Il demande un effort et/ou une forte motivation pour le démarrage, mais va aller crescendo ensuite, quand sera mis en route le cercle vertueux de la satisfaction : voir avancer son engagement donne une satisfaction qui va engendrer une énergie pour continuer, et faire avancer plus encore l’engagement.

La motivation de démarrage est efficace si elle est intrinsèque, reposant sur le seul désir de la personne.

L’engagement nécessite trois dimensions :

  • La compétence
  • L’autonomie
  • L’appartenance sociale.

Sens de la vie

Pas de bonheur véritable si l’on ne donne pas un sens à sa vie. C’est peut-être la dimension fondamentalement humaine. Il ne nous suffit pas de ressentir du plaisir et d’être engagé dans diverses actions ou aventures, mais de donner un sens à tout cela. Ce sens semble se décliner sur trois axes :

  • Affectif : amour, amitié, lien avec autrui
  • Cognitive : enrichir ses connaissances et faire fonctionner ses raisonnements, avoir une vision de la vie (weltanshauung), une spiritualité.
  • Comportemental : agir, réaliser, faire, bouger, ressentir,

On trouvera une bonne et simple approche la psychologie positive de Rébecca Shankland, Dunod, 2019,

Et dans Vivre, de Mihaly Csikszentmihalyi, Robert Lafont, 2013, qui constitue une référence

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